l’ancien président Mohamed Ould Abdel Aziz : LETTRE OUVERTE
CHERS COMPATRIOTES,
Si je m’adresse à vous aujourd’hui du lieu de ma détention arbitraire ce n’est pas pour que vous vous apitoyez sur mon sort. J’ai toujours essayé de vivre mes infortunes et détresses avec philosophie et dégusté mes succès avec modération. Convaincu que la vie est jalonnée de peine et de bonheur et manquant cruellement de linéarité. C’est peut-être ce qui pousse l’homme à l’effort.
Mais c’est parce que l’heure est grave, que je reviens à vous. Ce n’est pas par amour du pouvoir; la plupart d’entre vous connaissent ma relation avec le pouvoir. En 2003 il était dans la rue, en 2005 j’ai agi pour mettre fin au supplice que vivait tout le peuple au moment où nos champions de ”L’OPPOSITION” étaient en “conclave” à l’hôtel EL AHMEDI pour se prosterner devant la tyrannie, l’asservissement et la perversion hissant ainsi le drapeau de la résignation à son paroxysme. Et un jour de 2005, je me suis abstenu de me mettre au devant, pour pousser à l’ancrage de la démocratie dans le pays et dans les esprits.
Ce n’est qu’en août 2008, qu’ayant vu que le pays basculait inéluctablement vers l’insécurité que j’ai été obligé d’intervenir et reprendre les choses en mains. La remise du pays à l’époque sur les rails a été mon souci premier, l’instauration de la démocratie, le renforcement de l’Etat de droit et de ses institutions, la lutte contre la corruption et les inégalités sociales et la sécurisation du pays prouvée et reconnue de tous.
Après deux mandats de paix et de réalisations grandioses, j’ai comme le prévoit la constitution quitté le pouvoir malgré les sollicitations de l’intérieur et de l’extérieur pour m’y maintenir, sans regret ni amertume, heureux d’avoir recouvré mes droits et libertés de citoyen ordinaire. Mais depuis ce départ je n’ai cessé d’être interpellé par certains de mes compatriotes inquiets du tournant des événements, déçus de la gestion du pays, certains m’accusant à juste titre d’avoir été le parrain de ce pouvoir qu’ils qualifient de virtuel.
AUJOURD’HUI le pays, le nôtre souffre, il est dans une situation qui nous interpelle tous où que nous soyons. La démocratie ses principes et ses bases sont bafoués par une équipe au pouvoir unie pour ses intérêts et pratiquant comme système de pouvoir le féodalisme, le sectarisme et le régionalisme. Tous ces maux conjuguants leurs effets négatifs sur l’ensemble des secteurs de la vie de la nation. L’insécurité est grandissante à l’intérieur du pays, nos paisibles citoyens à la recherche de leur survie sont assassinés froidement à nos frontières nord et sud-est par dizaines sans que les tenants du pouvoir ne s’émeuvent. Les grandes villes du pays sombrent une à une dans l’obscurité alors qu’il y’a dix ans le pays exportait un surplus d’énergie vers deux pays voisins. De même la soif gagne du terrain malgré les efforts entrepris par le passé et les résultats probants obtenus. Les grands projets hydrauliques arrêtés ou négligés.
Dans le domaine de la santé et malgré l’avancée vertigineuse inespérée la décennie passée, ce secteur qui commande tout le développement du pays est entrain de mourir à petit feu, victime de la corruption et de l’insouciance d’un pouvoir absent. L’Etablissement des maladies hépatiques où les premières greffes étaient programmées est entré dans une torpeur qui renvoie au loin toutes les ambitions du pays et les espoirs des malades. La structure d’oncologie tant attendue et réalisée en un temps records pendant la décennie, n’a connu guère d’évolution et est privée de moyens parfois d’entretien de ses équipements.
L’éducation qui ces dernières années a pu retrouver le chemin de l’amélioration avec la construction d’infrastructures modernes, la révision des programmes et son adéquation avec les besoins du marché de l’emploi est entrée dans une léthargie.
Les Établissements Publics et les grandes entreprises d’Etat restructurés et assainis et qui faisaient des bénéfices sont tous aujourd’hui au bout de cinq ans dans des situations de presque faillite totale et surendettés auprès des banques de la place. C’est le cas de la société mauritanienne d’électricité, la SNDE, la Somagaz, la MAI et bien d’autres …
La renchérissement des prix particulièrement des denrées alimentaires provoqué par la hausse de la fiscalité et des taxes pour gonfler un budget orienté essentiellement vers le fonctionnement et des dépenses de prestige; voitures de luxe, avion présidentiel, … Ce train de vie peu rationnel que des pays plus riches que nous ne peuvent pratiquer est supporté dans le sang et la sueur par le pauvre citoyen qui au chômage ne peut trouver un emploi, qui malade ne peut plus se soigner et qui vit cloîtré dans l’insécurité, la soif et l’obscurité. S’il essaye de se libérer de ses stress en s’exprimant verbalement ou par écrit pour exorciser son sort il est vite identifié et trainé devant la justice d’Etat tribale pour n’être libéré qu’une fois terrorisé.
Ne parlons plus de PRESSE INDÉPENDANTE quatrième pouvoir dans certains pays, cette appellation n’existe plus chez nous, les chaînes privées sont passées sous le joug de la radio nationale pour lui servir de relais, ainsi toutes ont perdu leurs âmes sous la pression des contraintes ou quelques sous. Le budget destiné à la mise aux pas de la presse, des blogueurs a connu une augmentation de 300 % en 4 ans au moment où le budget de la santé n’a connu qu’une timide augmentation de 38% sur 4 ans sachant que le budget de l’Etat dans sa globalité a connu une augmentation de plus de 100 % ce quinquennat comparé à l’an 2019. Dans leur oppression des peuples les dictatures pratiquent les politiques de la CAROTE ET LE BÂTON mais le nôtre se singularise par la pratique de L’INTIMIDATION ET L’INDIGENCE.
Sur le plan MILITAIRE le pays qui était dans une position confortable par rapport à son environnement et dont les forces armées et de sécurité ont été restructurées et adaptées pour répondre aux défis de l’heure et accompagner l’évolution des menaces. Les Écoles de formation de la marine et de l’air ont été créées; les armées de la marine et de l’air remises à niveau pour accompagner les autres forces. Mais tous ces efforts ont été annihilés par l’inertie du pouvoir actuel et le dynamisme constant ces dernières années de nos voisins.
Si l’on jette un regard rapide sur les autres secteurs vitaux du pays leur situation n’est guère meilleure. Le secteur des ressources halieutiques naguère soupape de sécurité alimentaire et financière a été géré avec complaisance accordant des privilèges exorbitants aux navires étrangers, entre autres le rétrécissement des maillages de filets de pêche avec les dégâts que cela apporte et le laisser aller, pêche dans les zones interdites de reproduction. Le secteur des mines dont la quasi-totalité des textes ont été révisés durant la décennie passée pour les rendre plus bénéfiques pour le pays tout en restant attractifs est régi aujourd’hui avec un laxisme qui défie toutes les consciences.
Plusieurs interférences parasitent le secteur et font perdre à l’Etat ses intérêts aux profits des multinationales.
Il n’y a pas un secteur de la vie qui n’a été éprouvé par ce quinquennat; quinquennat de désastre, de détresse, de chagrin, d’infortune et d’abîme. Ces cinq ans passés à la tête de notre pays par ce pouvoir, nous ont plongés dans toutes les misères, nous ont davantage appauvris, nous ont affaiblis et éloignés de nous, tous les espoirs et poussés notre jeunesse, force vive de la nation à l’exil.
Ce tableau sombre non glorieux et peu exhaustif est celui que nous appréhendons, que nous vivons et subissons. Pour le changer, pour remettre le pays sur le droit chemin, il nous appartient, à tous de nous mobiliser, avec détermination et de ne viser et ne voir devant nous qu’un seul objectif le changement, UN CHANGEMENT PROFOND qui va remodeler notre société, l’enraciner dans la démocratie et développer l’esprit de patriotisme, de nationalisme positif et de solidarité. Changement bannissant pour de bon les maux qui gangrènent notre société tels le tribalisme, le régionalisme, le communautarisme de même que le sectarisme et bien d’autres mots. UN CHANGEMENT qui va adapter le pays à sa réalité à ses moyens et tiendra compte de ses composantes et laissera grandement place à LA JUSTICE ET À L’ÉQUITÉ.
Un CHANGEMENT DANS LA DOUCEUR opéré par la voie des urnes pour le bien de tous, cela est possible. Car il reste toujours une voie ouverte pour bien faire les choses; ÉTANT ARMÉ DE CONVICTION ET DU SENS DU DEVOIR.
Sur ce chers COMPATRIOTES vieux, jeunes, femmes et hommes où que vous soyez derrière vos petits troupeaux, dans vos champs suant sous un soleil éclatant, dans vos ateliers, exerçant vos petits métiers, pratiquants vos commerces, usant de toutes vos forces pour subvenir aux besoins pressants de vos familles. Ma pensée, ma compassion et mon empathie vont vers ceux parmi nous que la dureté de la vie a poussé vers l’orpaillage et qui subissent les avatars et les adversités des sbires du pouvoir défaillant; et qui continuent de braver la mort et les entraves malsaines pour préserver leur dignité et leur décence.
Je vous dis que la délivrance est proche et vous demande; à vous tous de vous joindre à moi pour qu’ensemble le 29 JUIN 2024 nous SAUVONS notre pays et le remettons sur la voie de la prospérité de l’unité et de la sérénité. Je n’oublie pas nos cadres qu’ils soient au service de l’administration publique ou dans le privé qu’ils soient enseignants se sacrifiant à l’éducation des générations ou médecins, soignants, tous exerçant dans des conditions difficiles pour honorer leur engagement vis avis de la nation.
Cet appel particulier s’adresse aussi à tous nos compatriotes dans les Amériques, en Afrique, en Europe et en Asie, que des décennies d’injustice et de privations ont poussées vers l’exil amer abandonnant les leurs et leur terre natale au risque parfois de leur vie . Je me remémore les braves hommes et femmes qui ont défendu vaillamment le pays au prix de leur sang et protégé nos richesses culturelles , traditionnelles et notre religion et pense à la génération d’officiers, de sous-officiers et vaillants hommes du rang qui ont pris leurs relèves dans tous les corps des forces armées et de sécurité pour perpétuer le sacrifice, l’abnégation et le dévouement à la nation en défendant ces moindres recoins, à eux le pays doit reconnaissance et gratitude mēme si malheureusement ça n’a pas été souvent le cas.
Aux vieux sages du pays, je dis ne laissons pas un mauvais héritage aux générations futures, corrigeons nos erreurs !. Aux jeunes femmes et hommes unissez vous, dépassez vous, prenez conscience de votre force et de vos responsabilités et soyez les moteurs du changement souhaité que tous souhaitent et attendent aujourd’hui.
À tous et pour terminer je demande une prise de conscience collective du danger qui nous menace et le pays et d’œuvrer sereinement pour y mettre un terme définitif et de se projeter dans un avenir radieux, rayonnant ouvrant la voie à toutes les attentes.
« ON NE PEUT PAS CONTRÔLER LE COMPORTEMENT DES AUTRES, MAIS ON PEUT CONTRÔLER LE MOMENT OÙ ON NE VEUT PLUS AVOIR À LE SUBIR”
MOHAMED OULD ABDEL AZIZ
ANCIEN PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE
ISLAMIQUE DE MAURITANIE.
CANDIDAT AUX ÉLECTIONS PRÉSIDENTIELLES JUIN 2024
Nouakchott, le 27 avril 2024 de mon lieu d’isolement.