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COP29: au moins 300 milliards de dollars de financements climatiques annuels pour les pays en développement

À l’issue de deux semaines de négociations houleuses, les pays du monde entier réunis à Bakou ont approuvé dimanche 24 novembre un accord prévoyant au moins 300 milliards de dollars de financements annuels pour les pays en développement, qui en exigeaient beaucoup plus pour combattre le changement climatique.

Après deux nuits de prolongations à la COP29, les pays pauvres et vulnérables se sont résignés à accepter cet engagement financier des pays développés à l’horizon 2035, qui relève leur engagement actuel de 100 milliards de dollars par an.

300 milliards de dollars par an, dans dix ans : les pays développés se sont engagés samedi à Bakou à davantage financer les pays pauvres menacés par le changement climatique, au terme d’une chaotique conférence de l’ONU en Azerbaïdjan dont le monde en développement repart furieux.

L’engagement financier de pays européens, des États-Unis, du Canada, de l’Australie, du Japon et la Nouvelle-Zélande, sous l’égide de l’ONU, est d’augmenter de 100 à « au moins » 300 milliards annuels d’ici à 2035 leurs prêts et dons aux pays en développement. Le montant n’est plus une somme maximale à atteindre, mais un plancher qui pourra être dépassé jusque, pourquoi pas, atteindre les fameux 1 300 milliards de dollars réclamés initialement, note notre envoyée spéciale à Bakou, Jeanne Richard. Ce qui compte, c’est que les pays développés, pollueurs, responsables historiques du changement climatique, seront ceux qui devront payer en premier. La Chine et les autres émergents pourront participer de manière volontaire, sans pression particulière.

De l’argent pour s’adapter aux inondations, aux canicules et aux sécheresses. Mais aussi pour investir dans les énergies bas-carbone au lieu de développer leurs économies en brûlant du charbon et du pétrole, comme les pays occidentaux l’ont fait pendant plus d’un siècle. L’argent pourra venir de multiples sources, publique, privée, ou banque de développement. C’était un point qui coinçait, car les pays du Sud tenaient à éviter des prêts qui risquent d’alourdir leur dette. Ils espèrent que d’ici là, le monde verra mieux l’intérêt de payer pour éviter les catastrophes encore plus destructrices qu’aujourd’hui.

Mais l’accord de la COP29, scellé pendant la seconde nuit de prolongation, laisse un goût amer à de nombreux participants. Les pays les plus pauvres de la planète et les États insulaires du Pacifique, des Caraïbes ou d’Afrique demandaient le double ou plus. Petite consolation, les pays du Sud ont réussi à obtenir une clause pour réviser cet accord d’ici à 5 ans au lieu de 10 ans. Ils espèrent que d’ici là, le monde verra mieux l’intérêt de payer pour éviter les catastrophes destructrices qui se profilent.

La transition hors des énergies fossiles pas explicitement mentionnée

L’appel à la « transition » vers la sortie des énergies fossiles, acquis principal de la COP28 de Dubaï combattu par l’Arabie saoudite, n’apparaît pas explicitement dans les principaux textes finaux présentés à la conférence sur le climat de l’ONU, la COP29, à Bakou dimanche.

L’appel à « opérer une transition juste, ordonnée et équitable vers une sortie des combustibles fossiles dans les systèmes énergétiques » avait été arraché dans la douleur en 2023. Un an plus tard, cette phrase n’est pas reprise explicitement dans les principaux textes soumis à la COP29 en Azerbaïdjan, qui tient sa richesse de l’exportation des hydrocarbures.

Elle est seulement évoquée à travers une mention du paragraphe 28 du document adopté l’an dernier, qui contenait la formule textuellement. En revanche, dans une victoire pour les pays pétrogaziers, l’un des documents publiés dimanche par la présidence azerbaïdjanaise juste avant une plénière finale réaffirme que « les combustibles de transition peuvent jouer un rôle pour faciliter la transition énergétique tout en assurant la sécurité énergétique ». Une allusion directe au gaz naturel fossile.

Les Européens, qui espéraient plus d’ambition sur la baisse des émissions de gaz à effet de serre, ne retrouveront pas non plus dans le texte la création du dispositif d’un suivi annuel des efforts de transition hors des fossiles (charbon, pétrole, gaz) qu’ils espéraient.

« Le groupe arabe n’acceptera aucun texte qui cible des secteurs spécifiques, y compris les combustibles fossiles », avait déclaré cette semaine Albara Tawfiq, responsable saoudien qui s’exprimait au nom du groupe arabe à l’ONU Climat. « Il y a eu un effort extraordinaire des Saoudiens pour qu’on n’obtienne rien », s’est étranglé cette semaine un négociateur européen.

« Aucun pays n’a obtenu tout ce qu’il voulait » pour le chef de l’ONU Climat, l’Inde dénonce un montant « terriblement faible »

Le nouvel objectif financier adopté dans la douleur à la COP29 de Bakou « est une police d’assurance pour l’humanité » face aux impacts du changement climatique, mais « il n’est pas l’heure de faire des tours d’honneur », a réagi Simon Stiell, le chef de l’ONU Climat. « Aucun pays n’a obtenu tout ce qu’il voulait, et nous quittons Bakou avec une montagne de travail à accomplir. Ce n’est donc pas l’heure de faire des tours d’honneur », a-t-il déclaré.

L’Inde a dénoncé dimanche l’accord conclu entre les pays riches pour fournir 300 milliards de dollars par an de financement climatique aux pays en développement, affirmant que l’Azerbaïdjan, pays hôte, n’avait pas tenu compte de ses préoccupations. « Le montant qu’il est proposé de mobiliser est terriblement faible. C’est une somme dérisoire », a déclaré Leela Nandan, fonctionnaire indienne, lors de la conférence COP29 à Bakou. « L’Inde s’oppose à l’adoption de ce document », a-t-elle indiqué, accusant le fait que la présidence azerbaïdjanaise lui a refusé la parole avant l’approbation finale du texte.

Le chef des négociateurs du groupe africain, Ali Mohamed, a regretté un engagement financier « trop faible » et « trop tardif » : « Nous quittons Bakou en sachant que nous avons réalisé des progrès dans certains domaines, mais que ce que nous avons réalisé est loin d’être ce que nous espérions ».

Tina Stege, l’envoyée climat des îles Marshall, archipel du Pacifique menacé par la montée des eaux, a aussi été déçu par l’accord : « Nous sommes venus en toute bonne foi, avec à cœur la sécurité de nos communautés et le bien-être du monde. Pourtant, nous avons été témoins du pire de l’opportunisme politique ici à cette COP, jouant avec la vie des personnes les plus vulnérables du monde […] Nous partons avec une petite partie du financement dont les pays vulnérables au climat ont un besoin urgent. C’est loin d’être suffisant. »

Le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres ne cache pas sa déception, mais relativise sur l’accord signé. « J’avais espéré un résultat plus ambitieux – tant sur le plan financier que sur celui de l’atténuation – pour répondre à l’ampleur du grand défi auquel nous sommes confrontés, mais l’accord conclu fournit une base sur laquelle construire », a-t-il déclaré sur le réseau social X.

Pour Laurence Tubiana, directrice de la Fondation européenne pour le climat et architecte de l’accord Paris, « la COP29 s’est déroulée dans des circonstances difficiles, mais le multilatéralisme est vivant et plus nécessaire que jamais. L’accord sur le financement du climat n’est pas aussi ambitieux que l’exige le moment. Le cadre qu’il établit fournit une base sur laquelle s’appuyer.

Tous les pays qui ont les moyens d’aider doivent se mobiliser », a-t-elle déclaré, avant d’ajouter : « Il n’y a pas de retour en arrière sur le consensus des Émirats arabes unis : nous ne pourrons pas atteindre les objectifs de l’Accord de Paris sans une transition juste des combustibles fossiles vers les énergies renouvelables et l’efficacité énergétique. La grande majorité des pays et leurs citoyens souhaitent des mesures fortes, et les gouvernements doivent continuer à aller de l’avant dans le cadre d’une coalition mondiale pour le climat. »

Par RFI

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