Déclaration CGTM 1er mai 2022
Le 1er mai 2022 intervient cette année dans un contexte mondial particulier caractérisé par l’invasion illégale et brutale de l’Ukraine par la Russie, toutes les régions du monde sont désormais minées par des conflits armés.
Une soixantaine de conflits font actuellement rage, faisant des millions de victimes, dont des centaines de milliers de vies perdues rien qu’au Tigré et au Yémen. Ces dernières années, 25 millions de personnes ont été forcées de chercher refuge en dehors de leur pays d’origine et des dizaines de millions d’autres ont été déplacées à l’intérieur de leurs frontières nationales – pour la plupart dans des pays moins riches.
La paix est au cœur des valeurs de la Confédération Syndicale Internationale et de toutes ses affiliées dans lemonde. Le rejet total des atrocités de la guerre doit nous conduire à concevoir un cadre pour une sécurité commune, cimenté par les principes des Nations Unies.
Ce cadre doit s’attaquer aux causes idéologiques, sociales et économiques des conflits, et réclamer des comptes aux individus qui entament et alimentent des combats et commettent des crimes de guerre où qu’ils surviennent.
D’autre part, la persistance d’une pandémie dénommée COVID 19 qui fait encore des victimes dans tous les continents, malgré les efforts et les progrès considérables des scientifiques qui ont abouti à produire des vaccins qui ont contribué à réduire de manière drastique le calvaire que toute la planète a connu durant les deux précédentes années. Un espoir de conjurer toutes les variantes de cette pandémie est noté et alimente la nécessite de préserver tous les dispositifs de riposte sanitaire mis en œuvre dans tous les pays du monde.
Toutefois, cette pandémie a fini de démontrer que la gouvernance mondiale actuelle dictée par la domination des capitaux et de l’économie du marché, imposée par les politiques néolibérales depuis la fin du siècle dernier, a conduit tout le système basé sur la dérèglementation des acquis sociaux et des droits fondamentaux au travail, de subir un cuisant échec d’une ampleur sans précédent.
Le démantèlement des filets de sécurité et de protection sociales, la privatisation des systèmes nationaux de santé, l’exclusion des millions de travailleurs et travailleuses de toute assurance médicale, le recours à l’accumulation des bénéfices et des dividendes en faveur des plus riches, la paupérisation de plus de ¾ de l’humanité à travers des règles inégales du commerce mondial, sont les conséquences de ces politiques néolibérales imprimées à la mondialisation actuelle.
Avec la perte de plus de 250 millions d’emplois en 2020 en raison de la pandémie de COVID-19 et 130 millions d’emplois supplémentaires en 2021, la Confédération syndicale internationale (CSI) appelle les gouvernements à faire de la création d’emplois un objectif central pour assurer la reprise et renforcer la résilience. Le plein emploi, inscrit dans la constitution de l’Organisation Internationale du Travail (OIT), doit demeurer une priorité. Cela nécessite en particulier de:
• Accroître l’investissement public.
• Investir dans le secteur public et créer des programmes publics d’emploi.
• Stimuler la création d’emplois de qualité.
• Investir dans l’éducation et la formation.
• Formaliser le travail informel.
Il est dans l’intérêt des travailleurs, des employeurs et des gouvernements que la santé et la sécurité au travail soient élevées au rang des principes fondamentaux de l’OIT et considérées comme un droit sur les lieux de travail.
C’est la raison pour laquelle les syndicats mondiaux, sectoriels et nationaux, ainsi que ceux représentés dans les usines, les centres de soins et les bureaux à travers le monde, souhaitent marquer la Fête international du Travail, célébrée ce 1er mai 2022, en demandant que cette mesure indispensable et tant attendue soit prise à la Conférence internationale du Travail tripartite prévue au mois de juin prochain.
Les gouvernements doivent ratifier et surtout appliquer la Convention 155 de l’OIT sur la sécurité et la santé des travailleurs et la Convention 161 de l’OIT sur les services de santé au travail (qui ne couvrent actuellement que 20 % des travailleurs), dans la mesure où elles spécifient les mesures pratiques devant être mises en place pour répondre aux problèmes que rencontrent au quotidien les travailleurs et les employeurs.
En outre, face à la crise économique et alimentaire qui pointe à l’horizon dans toutes les parties du monde, crise consecutive aux effets de la pandémie Covid 19, mais aussi des foyers de guerres, notamment en Ukraine, Il n’y a pas de plus grande démonstration de la nécessité d’un nouveau contrat social que cette affirmation, énoncée lors de la fondation de l’OIT il y a plus de 100 ans.
Lorsque la population est privée de la sécurité économique qu’offre un emploi décent, lorsque les droits des travailleurs et les autres droits humains sont bafoués, lorsque des milliards de personnes n’ont d’autres choix que de travailler dans l’économie informelle et lorsque les mensonges et la propagande remplacent la vérité, l’espoir et la promesse d’une paix dans le monde semblent hors d’atteinte.
Les syndicats, en tant que plus grande force démocratique et représentative sur terre, sont en première ligne pour défendre la démocratie, garantir les droits, éviter des conflits armés et pallier les conséquences dévastatrices de la guerre sur la vie des gens.
Dans notre pays, la CGTM appelle à une réorientation des programmes de développement économique afin de permettre des investissements publics dans l’économie réelle notamment l’élevage, l’agriculture, pour la création massive des emplois décents et d’une croissance durable capable de résorber le chômage des jeunes et le sous-emploi, à travers l’inclusion de toutes les forces vives en particulier les travailleuses et les travailleurs dans le respect et l’application des Principes et Droits Fondamentaux au Travail, notamment par:
- La revalorisation du Salaire Minimum Interprofessionnel Garanti (SMIG) ainsi que de la valeur indiciaire des salaires et traitements des Fonctionnaires et Agents de l’Etat,
- l’ouverture des négociations sociales pour une revalorisation des salaires et des avantages sociaux, tant dans le secteur public que dans le privé, avec l’implication des partenaires sociaux dont les organisations syndicales professionnelles les plus représentatives des travailleurs ;
- la mise en place par les pouvoirs publics, des mesures visant à assurer une répartition équitable et juste des richesses nationales, à travers des investissements sur l’économie réelle de chaque région pour valoriser les potentialités nationales ;
- Une meilleure régulation des prix sur le marché par des mécanismes d’approvisionnement et de distribution en denrées alimentaires de première nécessité maîtrisés et contrôlés par des organismes publics. Ces dernières années, le pouvoir d’achat des travailleurs a subi des chocs dus à la récurrence de la spéculation et des hausses répétées des prix des denrées de base, mettant en difficulté des milliers de ménages de travailleurs. Des politiques hardies de veille et de contrôle rigoureux doivent être promues afin d’assurer une meilleure régulation des prix à la consommation et pour mieux protéger les couches vulnérables de notre peuple.
- Etendre les filets de sécurité et de protection sociales à toutes les couches de travailleurs en particulier ceux de l’économie rurale, de la pêche artisanale, de la sous-traitance, des batiments et routes et de l’économie informelle
- Le respect des droits, en particulier le droit organisation et de negocation collective, pour permettre aux organisations professionnelles de travailleurs les plus representatives de défendre leurs travailleurs et leurs revendications et leurs droits fondamentaux face aux violations multiples et multiformes des textes législatifs et règlementaires qui les protègent,
- L’organisation dans les délais les meilleurs, des élections professionnelles de représentativité des organisations syndicales de travailleurs,
- La protection sociale, par la création d’un fonds national pour la protection sociale en faveur des couches les plus vulnérables et qui sont exclues des filets de sécurité sociale, notamment les travailleurs de l’économie informelle, et de l’économie rurale. Les différents programmes publics lances depuis l’apparition de la pandémie Covid 19, ont certes permis de soulager une partie importante des bénéficiaires issus du Régistre national unique (RNU) mais il n’en demeure pas moins qu’il faut étendre les filets de protection à toutes les categories sociales très vulnérables qui restent encore en marge des programmes actuels.
- L’égalité, pour les femmes et la non discrimination dans l’emploi et la profession, à travers un accès equitable à l’emploi pour tous et toutes,
La CGTM rappelle une fois de plus qu’il est temps, surtout en cette période d’érosion des emplois, que des négociations sociales tripartites véritables, basées sur le respect des dispositions législatives et règlementaires en la matière, soient tenues entre les partenaires sociaux afin que des solutions adéquates soient trouvées pour une meilleure reprise économique et sociale dans le pays et une amélioration des conditions de vie et de travail de tous les travailleurs et de toutes les travailleuses dans notre pays.
La CGTM exhorte, en ce début du mois de mai, les travailleurs et travailleuses de notre pays à sauvegarder l’esprit et la mémoire des acquis que leurs collègues Ouvriers de l’ex-MIFERMA (devenue SNIM) leur ont légués depuis le 29 mai 1968, suite à leur grève générale historique massacrée dans le sang, pour perpétuer l’héritage et le flambeau de la détermination du mouvement syndical national à jouer son rôle d’avant-garde dans la lutte pour l’émancipation de notre peuple multi-ethnique et riche de sa diversité pour un bien-être commun de toutes ses composantes nationales.
La CGTM félicite les travailleurs et travailleuses de notre pays à l’occasion de la fête internationale du travail, laquelle, malheureusement, ne sera pas célébrée par des rassemblements massifs et leur demande de continuer à observer les consignes sanitaires en vigueur et les vaccinations recommandées pour faire face à la prévalence de la pandémie pour son éradication définitive.
Nouakchott, le 1er mai 2022
Le Comité exécutif de la CGTM