La pirogue disparue depuis 10 jours a débarqué en Mauritanie, 28 morts
Info Migrants – L’embarcation en détresse disparue des radars depuis le 21 octobre a finalement débarqué hier soir à Nouakchott, en Mauritanie. Deux cadavres gisaient parmi les 122 rescapés, sur 150 passagers au départ. Les autres corps ont été abandonnés en mer. Les ONG qui avaient donné l’alerte dénoncent la « non-assistance » des autorités prévenues.
Cela faisait dix jours qu’elle avait disparu. La pirogue et ses 150 passagers partie le 21 octobre de Niodor, dans le sud du Sénégal, est arrivée hier à Nouakchott. Les autorités mauritaniennes ont confirmé à l’agence de presse espagnole EFE l’arrivée de l’embarcation sur leurs côtes.
D’après la plateforme d’aide aux migrants en mer Alarm Phone, qui avait donné l’alerte, sur les 122 personnes débarquées hier en Mauritanie, 37 ont été hospitalisées dans un état critique.
Deux corps ont été retrouvés dans la pirogue à son arrivée en Mauritanie, les 26 autres ont été jetés par-dessus bord par les passagers lors de la traversée, précise EFE.
Cette annonce met fin à une longue détresse de dix jours pour les migrants. Car tout juste cinq jours après son départ des côtes sénégalaises, la pirogue est tombée en panne. Les migrants préviennent alors Alarme Phone et l’ONG espagnole Caminando Fronteras. Dans la foulée, alerte est donnée au MRCC (centre de sauvetage et de coordination) espagnol, qui localise le bateau. Mais il transmet la responsabilité du sauvetage aux forces marocaines car l’embarcation se trouverait dans leurs eaux, à environ 150 kilomètres à l’est de Guerguerat (sud du Maroc) et de Nouadhibou (Mauritanie).
Puis Rabat se défausse à son tour du sauvetage, et le renvoie aux autorités mauritaniennes, qui estime que le canot se trouve dans la SAR zone sénégalaise.
Hier, plus aucune organisation n’était en contact avec ces 150 migrants. Jusqu’à son arrivée à Nouakchott.
« Cette catastrophe s’est produite alors que les autorités avaient été alertées depuis plusieurs jours. Elles ont refusé d’assumer leur responsabilité, déplore Alarme Phone sur X. Nous ne pouvons qu’exprimer la colère et la tristesse que nous ressentons face aux conséquences de cette non-assistance ».
D’après EFE, certains navires marchands ont par ailleurs distribué de l’eau et de la nourriture aux passagers de la pirogue, en plein océan, sans toutefois les secourir.
« Sans nourriture et sans eau depuis deux jours »
Les passages par la route des Canaries sont en nette augmentation cette année. Entre le 1er janvier et le 15 octobre 2024, 32 800 personnes au total ont débarqué dans l’archipel, soit 39,7% de plus qu’à la même période l’année dernière.
Cette route en pleine océan Atlantique, longue de plus de 1 000 km pour les embarcations parties du Sénégal et de Mauritanie, est très dangereuse. Les naufrages y sont nombreux. Le 28 septembre, au moins 50 migrants ont disparu et neuf sont morts après que leur pirogue a chaviré à quelques kilomètres de l’île d’El Hierro. Les naufragés, partis de Nouadhibou en Mauritanie, « étaient sans nourriture et sans eau depuis deux jours », a expliqué à la presse Anselmo Pestana, délégué du gouvernement aux îles Canaries.
D’après l’association Caminando Fronteras, plus de 4 800 exilés ont péri dans l’Atlantique, soit un décès toutes les 45 minutes, entre janvier et mai 2024.
Certaines pirogues dérivent aussi très loin des côtes africaines. Début août, un bateau avec 14 corps en « état de décomposition avancée » avait été découvert près des rives de la République dominicaine, dans la mer des Caraïbes. Selon les premiers éléments retrouvés à bord, dont des documents d’identité mauritaniens et sénégalais, la pirogue avait pris la route des Canaries avant de dériver de l’autre côté de l’Atlantique.
Certaines embarcations ne sont, elles, jamais retrouvées. D’après Caminando Fronteras, 244 navires ont complètement disparu sur la route des Canaries entre 2018 et 2022.