Cette image ne montre pas des Maliens réduits en esclavage ou torturés en Mauritanie

Africa Check – En avril 2024, la Mauritanie a accusé le Mali de mener des exactions contre des citoyens mauritaniens à la frontière des deux pays par le billet de l’armée malienne et des combattants du groupe Wagner. Ces accusations ont intensifié des tensions diplomatiques déjà vives entre les deux pays depuis 2020.
« Plusieurs de nos compatriotes civils ont été tués par l’armée malienne et des combattants du groupe Wagner dans des campements mauritaniens à la frontière. Nous avons envoyé des preuves à Bamako », a déclaré à l’AFP une source sécuritaire mauritanienne présente à la frontière entre les deux pays.
Les deux pays sont également en désaccord sur des questions de migration. La Mauritanie a engagé depuis, le 2 mars 2025, une campagne d’expulsions de migrants subsahariens en situation irrégulière, notamment des Maliens, provoquant de fortes critiques dans la région.
D’après Mossa Ag Attaher, le ministre des Maliens établis à l’Extérieur, plus de 1 800 migrants maliens ont été refoulés de Mauritanie depuis début mars.
« Le gouvernement du Mali exprime son indignation, dénonce avec la dernière rigueur les traitements subis par ses ressortissants en Mauritanie », a indiqué Mossa Ag Attaher, le 26 mars 2025, lors d’un point de presse au Centre d’information gouvernementale du Mali (Cigma). Lors de sa visite à Nouakchott, Mossa Ag Attaher s’est entretenu avec le président mauritanien Mohamed Ould El-Ghazouani afin de discuter des mesures à adopter pour apaiser les tensions.
Les deux pays ont convenu de plusieurs dispositions : l’ambassade du Mali en Mauritanie sera impliquée dans les processus d’expulsions, garantissant une protection juridique et la possibilité d’introduire des recours. Le gouvernement malien pourra également rendre visite à ses ressortissants en situation irrégulière détenus en Mauritanie. Par ailleurs, des facilités de régularisation seront accordées à certains Maliens sans papiers.
La publication à vérifier
Le 22 mars 2025, la page Facebook J’aime mon pays le Burkina Faso a publié une photographie dans ce contexte. Elle montre un homme assis à terre, le visage partiellement masqué par sa main. À ses côtés, une autre personne, accroupie, semble lui apporter du réconfort. Un pictogramme représentant un visage en pleurs couvre la tête de cette dernière, mais son t-shirt bleu reste visible. L’image est accompagnée d’une légende affirmant : « Des Maliens torturés comme des esclaves en Mauritanie. Des Africains qui torturent leurs frères africains. Vraiment, à quand l’Afrique ? ».
Une photographie d’un migrant à Tripoli, Libye
Grâce à une recherche inversée d’images via le logiciel TinEye, nous avons retrouvé cette photographie dans un article du média spécialisé Info Migrants, publié le 20 mars 2020. « Un immigré pleure dans un centre d’accueil pour migrants à Tripoli », indique la légende accompagnant cette image. Elle a été prise par le photojournaliste Zuhair Abusrewil.
Des recherches supplémentaires révèlent que cette image est apparue pour la première fois sur Internet dans une publication de l’agence de presse italienne ANSA, le 12 décembre 2017. Elle représente un immigré dans un camp de migrants à Tripoli, en Libye, et est attribuée à ANSA comme source officielle.
Faysal Arnold Boukary
Chercheur