À propos du Président
1. Du respect
Au moment où le débat sur “la protection des symboles” semble -fort heureusement- marquer le pas, je voudrais attirer l’attention de certains de ses inspirateurs, sur le fait que le respect du président de la République consiste à ne pas le tromper aujourd’hui, pour le vilipender demain…
Le respect du premier magistrat du pays consiste, dans mon entendement, à lui dire ce que l’on pense de sa gestion du pays, sans jamais aller au-delà… Le respect du garant de la souveraineté du pays et de la dignité de ses citoyens prévoit d’attirer son attention sur toute brèche susceptible d’attenter à cette souveraineté ou à cette dignité.
Le respect du défenseur des symboles nationaux exige de le convaincre de ne pas accepter la vanité des “titres” et des “qualificatifs” dont la finalité ultime est de compromettre sa stature morale.
Le respect du vainqueur du scrutin au suffrage universel passe par le rappel permanent de cette lapalissade: l’unique source du pouvoir présidentiel est populaire… Le respect du vrai patron de la diplomatie de notre pays ne peut être intégral sans la nécessaire exigence intellectuelle et morale (dans cet ordre!) à son endroit, spécialement en ces temps critiques de vive compétition régionale et internationale.
2. Remarque légitime
Je souhaiterais anticiper une remarque légitime: pourquoi n’avoir pas édicté et mis en œuvre ces principes lorsque “tu” étais aux côtés de l’ex-président du pays? La réponse est simple et je l’ai déjà mentionnée à maintes reprises sur ce “mur”: l’ex-président m’a toujours offert la latitude de m’exprimer de manière libre et honnête; j’en veux pour preuve sa remarque télévisée concernant le “troisième mandat”… Ayant, à l’époque, usé librement (donc) de mon droit d’appréciation des affaires publiques, je n’émettrai pas de critique, sauf exception, au sujet de la “décennie”, aujourd’hui ou demain ; car, au risque de se contredire piteusement, ce droit ne peut, à mon sens, s’exercer qu’une seule fois! En terme d’efficacité, l’éthique de responsabilité (au pouvoir) et l’éthique de contestation (dans l’opposition) ont ceci de différent : la première se conjugue mieux avec la discrétion et la seconde se décline plutôt dans la “vocalité” écrite ou orale, c’est connu!…
3. L’interview
Le timing de la dernière interview du président de la République dans des médias étrangers m’a surpris car, au moment où les citoyens de ce pays ploient sous une double contrainte sanitaire et économique, le président aurait pu reculer l’heure de la “communication politique”, en attendant de meilleurs auspices. Sur un autre plan, voir le président si disert à propos de la situation politique d’un pays frère certes, mais étranger tout de même, tout en adoptant une circonspection stricte au sujet de la situation politique nationale (le sort de l’ami et du compagnon de 40 ans!), m’a honnêtement interloqué.
Le refus du président de reconnaître (Interview en arabe) la situation de misère dans laquelle vit une grande partie des Mauritaniens, en dépit des ressources économiques significatives du pays et de la taille réduite de la population, m’a paru un tantinet désinvolte, particulièrement en ces moments éprouvants pour la plupart des citoyens de ce pays.
Le comble du choc pour moi, et j’avoue l’avoir vu venir, ce fut lorsque l’un des journalistes étrangers osa s’adresser si familièrement au Président pour lui parler de ses “yeux” qui “parlent”, une insinuation chargée d’inconvenables sous-entendus…
Une interview présidentielle se prépare minutieusement à tous les niveaux, car elle s’apparente à une corrida ; les “pauses”, à titre d’exemple, encouragent le “taureau” à attaquer toutes cornes déployées! Une solennité excessive peut s’apparenter à un déploiement inapproprié, par le matador, de la muleta, provoquant instinctivement l’attaque de la part du ‘’taureau”, avec le risque de prendre un coup de corne d’une redoutable létalité…
En réalité, j’ai modérément apprécié cette interview; le Président devra, pour le coup, évaluer son staff de communication, car il y va de la dignité du pays…
Isselkou Ahmed Izid Bih Néyé