Olivier Dubois, Algérie, France, groupe EI… le chef d’Aqmi répond aux questions de France 24
Abou Obeida Youssef al-Annabi est l’émir d’Al-Qaïda au Maghreb islamique, la branche sahélienne de la centrale terroriste Al-Qaïda.
Ses prétentions d’extension au Sahel n’ont « aucune limite », dit-il dans une interview exclusive accordée à Wassim Nasr, journaliste à France 24. Notre confrère de France 24 Wassim Nasr, spécialiste du jihadisme, a mis un an à négocier avec Abou Obeida Youssef al-Annabi une interview exclusive.
Seul un très court extrait de pure forme en a été diffusé ce lundi matin sur la chaîne, comme preuve d’authenticité. En effet, pour ne pas faire la propagande d’Al-Qaïda, les réponses d’Abou Obeida Youssef al-Annabi n’ont pas été diffusées, mais rapportées, en substance, par le journaliste.
Tout d’abord, Abou Obeida Youssef al-Annabi confirme que c’est bien Aqmi qui détient Olivier Dubois. C’est la première fois qu’un chef d’Al-Qaïda le dit. Jusqu’ici, c’est le journaliste français qui avait lui-même expliqué, dans des vidéos diffusées par ses ravisseurs, être aux mains du Groupe de soutien à l’Islam et aux musulmans (le Jnim, son acronyme arabe), allié d’Al-Qaïda. Olivier Dubois a été enlevé le 8 avril 2021 à Gao alors qu’il avait rendez-vous avec un chef jihadiste local pour une interview. Abou Obeida Youssef al-Annabi dément pourtant toute « invitation » et assure que la balle est dans le camp des autorités françaises pour négocier sa libération.
Par ailleurs, l’émir d’Aqmi se félicite du départ de l’armée française du Mali – le retrait de la force Barkhane s’est achevé en août dernier – et du Burkina – la force Sabre a officiellement pris fin le 18 février dernier –, qu’il considère comme une « victoire », même si ce sont les autorités maliennes et burkinabè de transition, et non le groupe jihadiste, qui ont obtenu ces départs. Quant aux supplétifs russes de l’armée malienne, ils sont, de la même manière que les soldats français, désignés par le chef d’Aqmi comme des forces « coloniales » ennemies.
Aqmi nie à nouveau son rôle dans le massacre de Solhan
Interrogé sur les prétentions d’expansion d’Aqmi au Sahel, son chef affirme qu’elles n’ont « pas de limites ». Mais les objectifs d’Aqmi sont, selon lui, « purement locaux » : si les intérêts français au Sahel peuvent être pris pour cible, le chef jihadiste récuse ainsi toute velléité de mener des attaques sur le territoire français.
L’émir d’Aqmi, de nationalité algérienne, s’exprime également sur la situation de son pays. Alors qu’Aqmi avait soutenu le « hirak », la révolte populaire initiée en 2019 en Algérie, l’émir d’Aqmi confirme ce qu’il avait déjà dit en janvier dernier : la trêve est finie, il appelle donc au combat en Algérie.
Sur la « guerre » qui oppose Aqmi à son grand rival, le groupe État islamique, Abou Obeida Youssef al-Annabi confirme qu’il cherche à nouer des alliances avec des tribus locales, mais assure qu’il n’en cherche aucune avec des États, ni avec des mouvements politiques – une référence aux groupes signataires de l’accord de paix de 2015 au Mali, dont certains chefs se sont récemment entretenus avec Iyad Ag Ghaly, chef du Jnim, allié d’Aqmi.
Enfin, le chef de la branche sahélienne d’Al-Qaïda nie une nouvelle fois toute responsabilité dans le massacre de Solhan, qui avait fait au moins 132 morts au Burkina Faso en juin 2021. Les autorités burkinabè ont pourtant attribué ce massacre à une katiba affiliée au Jnim. Le groupe État islamique avait également renvoyé la responsabilité de ce massacre à Al-Qaïda.
Texte par : David Baché