Les 168 migrants secourus par les Espagnols, et refoulés par la Mauritanie, débarquent au Sénégal
Info Migrants – Les 168 migrants, secourus la semaine dernière par un navire de la Garde civile espagnole dans l’Atlantique, ont finalement débarqué mercredi au port sénégalais de Saint-Louis. La Mauritanie refusait depuis six jours d’accueillir ces naufragés, secourus au large de ses côtes.
Ils ont finalement pu fouler la terre ferme, après plusieurs jours d’incertitude et d’angoisse. Cent soixante-huit migrants ont débarqué mercredi 30 août en fin de matinée au port de Saint-Louis, au nord du Sénégal, selon l’agence de presse espagnole Efe.
Ces exilés ont pris la mer depuis les côtes sénégalaises dans le but d’atteindre les îles espagnoles des Canaries, distantes d’environ 1 500 km. Mais leur route a pris fin jeudi 24 août, lorsqu’un navire de la Garde civile espagnole a secouru l’embarcation, au large de la Mauritanie. Le bateau stationnait depuis en face du port de Nouadhibou, sans pouvoir y accoster. Les autorités mauritaniennes refusant d’accueillir ces migrants, majoritairement sénégalais.
Selon le ministre espagnol de l’Intérieur, Fernando Grande-Marlaska, tous les exilés sont « en sécurité à terre ». Le responsable politique a tenu à remercier les agents de la Garde civile pour leur travail « extraordinaire » à bord du patrouilleur. Des tensions avaient éclaté ce week-end sur le navire, en raison des conditions de vie sommaires : les exilés n’avaient pas accès à des douches ou des toilettes, et ils dormaient sur le pont à la merci des intempéries. Certains étaient par ailleurs blessés.
Ce débarquement au Sénégal met fin à plusieurs jours de négociations entre l’Espagne et la Mauritanie. Bien que Nouakchott est un partenaire stratégique de Madrid dans la lutte contre l’immigration irrégulière, elle n’a pas souhaité accéder aux exigences de l’Espagne. Les autorités espagnoles ont cependant assuré que ce bras de fer n’avait pas entaché les « excellentes » relations avec leurs homologues mauritaniens.
Un rapatriement « illégal »
Du côté des associations et des organisations internationales, ce rapatriement pose question. Mardi, le Haut-commissariat des Nations unies aux réfugiés (HCR) a exhorté l’Espagne à respecter le droit international. L’agence onusienne a rappelé la nécessité d’identifier les migrants et leur éventuelle vulnérabilité avant un retour au Sénégal, et de les informer de leur possibilité de déposer l’asile en Espagne.
Dans un communiqué publié mardi, la Commission espagnole d’aide aux réfugiés (CEAR) a demandé à Madrid de mettre fin à ce rapatriement, qu’elle juge illégal. L’ONG signale « que parmi les personnes secourues, il pourrait y avoir des personnes ayant besoin d’une protection internationale ».
En outre, la CEAR rappelle qu’à « l’heure actuelle au Sénégal, les droits d’une grande partie de la population ne sont pas garantis en raison de l’instabilité croissante que connaît le pays, où des milliers de personnes ont été arrêtées pour avoir manifesté contre le gouvernement, notamment le principal leader de l’opposition, actuellement en prison ».
Madrid assure que l’opération « a été conforme à la loi et a sauvé la vie de 168 personnes », sans préciser si les migrants avaient pu demander l’asile.
Leslie Carretero